Publié par Froggy | Classé dans Moyen-Orient | Publié le 15-05-2016
Mots-clefs :frontière turque, hospitalite, indépendant, Iran, Jolfa, Julien, Khoy, Orumiyeh, Rasht, Tabriz, Téhéran, voyage
Nous sommes le 26 novembre 2014 et c’est une petite page de mon voyage en Iran qui se tourne lorsque je débarque à Téhéran.
J’ai maintenant quitté les régions désertiques du pays : finis les paysages arides, sableux ou rocheux, froids et secs, finis les villes de terre, de brique et d’argile, comme à Yazd ou à Kashan. Terminée aussi cette agréable sensation de flottement géographique, traversant des contrées si lointaines et si singulières que l’on a bien du mal à les situer sur une carte ou à les apparenter au reste du monde.
Me voilà maintenant dans le nord de l’Iran, pas très loin de la mer Caspienne à vol d’oiseau. Une région de plus en plus humide à mesure que l’on se rapproche de cette mer intérieure que seule une étroite chaîne de montagnes sépare de la capitale iranienne.
1) Téhéran
Je débarque à la gare centrale de Téhéran dans la soirée après quelques 250 kilomètres de bus depuis Kashan, petite ville calme du désert iranien que je commence à regretter en observant déjà les grandes avenues grises et bitumées de la capitale, la circulation encombrée, la foule de monde digne d’une métropole de plusieurs millions d’habitants. Rien de tout cela ne m’inspire vraiment…
Je laisse à nouveau mon camarade Moonzur qui s’en va retrouver sa famille de Téhéran, et nous nous donnons rendez-vous dans quelques jours à Tabriz pour un bout de route supplémentaire. Puis je téléphone à Ebad, mon copain iranien rencontré quelques jours plus tôt à Yazd, mon seul et unique contact à Téhéran. Ebad est heureux de ma venue, il viendra me chercher à la gare et en attendant son arrivée je passerai une heure ou deux assis sur un siège, bonnet sur la tête, polaire sur les épaules, à contempler le brouhaha de la grande gare, dans la grande ville, les allers-et venus en tous sens des passagers en transit, le manège incessant des vendeurs de billets. Tout ce monde et tous ces bus qui vont et qui viennent dans un mouvement qui semble ne jamais s’arrêter… La ville ne s’endort-elle jamais ?
Lorsque Ebad arrive à la gare nous devons encore passer quelques minutes au téléphone pour arriver à nous retrouver au milieu de la foule. Ah, le pull rouge, avec le bonnet noir ? En face du bureau numéro cinq ? Ca y est, je te vois ! Joie des retrouvailles même si nous nous étions dis au revoir seulement quelques jours plus tôt.
Nous prenons ensuite un bus de ville puis un métro pour nous rendre chez son cousin Ali qui vit en appartement dans la banlieue de Téhéran. Long et fatiguant trajet dans les transports en commun… Heureusement qu’Ebad est avec moi, je fuirais la ville en courant si j’étais arrivé là tout seul !
L’accueil chez Ali est plus que chaleureux : on me reçoit à bras ouverts dans ce petit appartement dénué de tout mobilier à l’exception de quelques canapés où je suis inévitablement invité à m’installer pour déguster le thé. Comme toujours le sol de la pièce principale est couvert de tapis colorés, tapis sur lesquels nous nous installerons un peu plus tard pour prendre le dîner accompagné de doogh, cette boisson traditionnelle à base de lait et de yaourt légèrement salée.
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Ni Ebad ni Ali ne parle vraiment anglais, mais nous nous débrouillons avec quelques mots et beaucoup de gestes et de sourires. Ali tente de m’expliquer que, comme la plupart de ses concitoyens, il est conscient de la mauvaise image que peut avoir l’Iran -et les Iraniens- en Occident, mais que la réciproque n’est généralement pas vraie : beaucoup d’Iraniens ont une image plutôt positive de l’Occident, de la France, de l’Europe et même des États-Unis qu’ils admirent sur certains aspects. Il me fait par contre la démonstration d’une haine palpable envers l’un des seuls pays qu’il considère comme « ennemi » de son peuple : Israël. Expérience mise en pratique devant moi en désignant une coquille de noix ouverte qu’il écrasera violemment de son poing en répétant « Israël », la mine sévère…
Dans son discours assez manichéen (pour sa défense, la barrière de la langue n’aide pas à formuler des nuances) Ali tente de me convaincre même si je n’en ai guerre besoin que les Iraniens, chiites, ne sont pas des gens méchants, et surtout pas des terroristes, contrairement à certains de leurs voisins sunnites qu’il semble ne pas beaucoup apprécier.
A la télévision ce soir le journal annonce un nouvel échec de la reprise des négociations avec les États-Unis sur le nucléaire iranien. Autre grand sujet de discussion ici-bas !
Le petit festin que l’on me sert ce soir se terminera sur des paroles plus légères et dans la rigolade. Ebad m’annonce son programme pour la journée de demain : nous irons ensemble visiter Téhéran. Chouette !
Après une excellente nuit passée sur le matelas de la chambre d’amis puis un petit déjeuner à base de pain plat, de yaourt, de confiture et de dattes, nous partons explorer cette grande capitale de 9 millions d’habitants (15 avec l’agglomération) qui, honnêtement, ne m’a jamais fait rêver plus que ça !
Je découvrirai sans grande euphorie la « célèbre » tour Azadi (ou « tour de la liberté » l’un des symboles de la ville) ainsi que la tour Milad : la plus grande tour d’Iran (435 mètres) légèrement engloutie dans la brume… où bien serait-ce la pollution urbaine ?
Je (re)découvrirai aussi -et surtout- la circulation folle et les embouteillages, le béton et le bruit, les longs trajets en bus et les correspondances à n’en plus finir, la foule, la foule, la foule. Quel choc, tout ce monde ! Le désert me manque… Les petits villages d’Iran et même les villes de province m’avaient habitué à une profonde tranquillité quasi-permanente qui n’était pas pour me déplaire. Malgré l’accueil chaleureux d’Ebad et Ali je dois dire que je ne me plais pas du tout à Téhéran, je n’ai qu’une envie : quitter la ville au plus vite.
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Je passerai une nuit encore avec mes amis de Téhéran et puis je m’en irai le lendemain, comme prévu. Cette fois nous nous disons au revoir pour de bon… Je sens bien qu’Ebad est triste de me voir partir, je le suis aussi après tous les bons moments passés à Yazd la semaine dernière, dans improvisation la plus totale, rencontre de deux voyageurs aux destins différents, déjà des souvenirs, un début de nostalgie, et puis ces retrouvailles à Téhéran. J’espère qu’il y en aura d’autres… Mais quand ?
Ebad me raccompagne à la gare routière et il me faudra peu de temps avant que je ne me retrouve billet en main à bord de l’un de ces innombrables bus desservant les quatre coins du pays. Celui dans lequel je suis monté ce matin est à destination de Rasht, une ville située au nord-ouest de Téhéran, au bord de la mer Caspienne, ma prochaine étape.
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- Mon itinéraire complet en Iran est tracé en noir sur la carte. Les parties entourées représentent les zones couvertes dans cet article. (Cliquez sur la carte pour l’agrandir)
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2) Rasht
La région de Rasht est bien connue de tous les Iraniens pour ses « attraits touristiques » que sont : l’humidité, la pluie, la douceur du climat en été comme en hiver, ainsi que les bords de mer et la végétation presque luxuriante si l’on compare avec le reste de l’Iran, du moins par rapport aux régions centrales du pays, désertiques et arides. Les gens du désert ne rêvent que de pluie et de forêts, c’est bien normal !
Pour ma part, arriver à Rasht sous un ciel gris, du vent froid et de la pluie, ne m’inspire pas beaucoup plus que d’arriver dans la banlieue grisâtre de Téhéran. Plutôt déprimant comme entrée en matière !
Heureusement je ne me retrouve pas tout seul en arrivant à Rasht, j’ai ici un contact Couchsurfing (que j’avais contacté quelques semaines plus tôt, lorsque j’avais encore des accès à internet réguliers en Inde et à Dubaï). Il s’appelle Essi et je vais le retrouver à son appartement grâce aux informations qu’il m’envoie par SMS. Ca y est, je reconnais la moto à l’entrée de son garage, j’y suis !
Essi héberge actuellement un voyageur italien et je les retrouve tous les deux pour partager une fin de repas, ou plutôt un goûter constitué de fromage blanc, de pain et de miel. (En fait de miel ce sont même de gros blocs d’alvéoles dégoulinant de miel que les Iraniens aiment déguster à tout moment de la journée).
Essi ne pourra malheureusement pas m’héberger ce soir mais il contacte sans tarder ses amis couchsurfers pour me dénicher un hôte à Rasht, et en peu de temps l’un d’eux répond présent à l’appel. Le Couchsurfing est décidément une belle communauté ! Quant à l’hospitalité iranienne, elle reste fidèle à elle-même.
C’est donc comme cela que je vais faire connaissance avec Mazyar, un couchsurfer d’une trentaine d’années qui me retrouvera un peu plus tard en ville après sa journée de travail, sur la jolie petite place centrale en face de la grande horloge. Le vent et la pluie m’obligent à me réfugier à l’intérieur d’un bâtiment en attendant son arrivée. Sale temps !
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Mazyar m’emmène d’abord à son appartement pour que nous puissions y déposer nos affaires, je fais connaissance avec son frère Mohamad puis nous ressortons en ville malgré la grisaille et la brume. La ville semble vraiment charmante avec ses bâtiments anciens, ses parcs et ses arbres, mais la météo ne permet pas tellement d’apprécier. Nous passons néanmoins quelques temps à nous balader, nous profiterons aussi d’une accalmie pour nous asseoir dans un parc et discuter de plein de choses en dégustant quelques gâteaux à la châtaigne, spécialité locale.
J’aurai là une discussion passionnante avec ce professeur d’anglais à l’université qui ne comprend pas comment son pays a pu en arriver à un régime politique aussi extrême et absurde, basé sur la religion, l’islam et la charia. Une aberration sociale ayant engendré une terrible privation des libertés fondamentales individuelles. Il m’explique aussi avec beaucoup de tristesse et une pointe de désespoir à quel point les relations entre hommes et femmes peuvent être compliquées, toujours à cause de cette foutue charia qui régit les interactions sociales, donnant naissance à une profonde frustration des uns et des autres. Sans parler des règles vestimentaires imposées (le voile notamment) qu’un grand nombre de femmes (et d’hommes) souhaiteraient voir disparaître. Il est clair que le totalitarisme religieux ne convient pas à tout le monde ici, où beaucoup de jeunes surtout ne se reconnaissent pas dans ce monde islamisé digne d’une dictature moyenâgeuse. Une minorité croissante de jeunes Iraniens ne croient plus en la religion et se considèrent même comme radicalement athées, mais sans la moindre possibilité de parler de ce sujet en public sous peine de finir en prison. D’ailleurs, beaucoup d’entre eux considérent l’Iran comme une grande prison à ciel ouvert pour tous ceux qui pensent différemment de l’oligarchie islamique. Une bien triste situation.
Le soir, de retour à l’appartement de Mazyar je copierai sur son ordinateur le film « Persepolis » : film franco-américano-iranien sur la chute du régime du Shah et l’instauration de la république islamique, excellent film d’animation (de 2007) aux nombreuses récompenses (Césars, Festival de Cannes, etc.) mais bien entendu censuré en Iran, interdit à la diffusion et à la vente. Mazyar est heureux de le récupérer enfin, après l’avoir longtemps cherché.
J’aurais souhaité le lendemain aller faire un tour à Masuleh, un magnifique village (parait-il) niché dans les montagnes de l’Elbourz devenu une destination touristique populaire dans la région. Mais à cause de l’incertitude concernant les transports en commun et surtout à cause de la météo je me verrai obligé de renoncer. Il ne me reste plus qu’à quitter cette région pluvieuse (je ne suis pas venu à la meilleure saison!) pour m’en aller le plus loin possible vers l’ouest.
Avant de quitter Rasht je passerai une très bonne nuit ici chez Mazyar avec tout le confort d’un appartement moderne.
Demain je prendrai un bus pour Tabriz, une ville située au nord-ouest de l’Iran. Dans le bus une discussion s’établit avec mon voisin de siège : un étudiant iranien qui bafouille assez correctement quelques mots d’anglais, au fil de la conversation après avoir essuyé l’incontournable thème du « football », il en viendra à me demander avec un certain mépris et plus-ou-moins dans ces mots : « C’est vrai que vous en France vous aimez les homosexuels ? »… J’imagine que le grand débat sur le mariage homosexuel en France avait du retentir jusque dans les médias iraniens… à travers le filtre réducteur, et néfaste, de la pensée religieuse extrémiste.
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3) Tabriz et Jolfa
Tabriz est une grande ville située dans l’extrême quart nord-ouest de l’Iran, à moins de 200 km des frontières de la Turquie, de l’Iraq, de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan. J’y retrouverai Moonzur qui est arrivé le même jour que moi mais directement depuis Téhéran. Lui et son béret, ils commençaient à me manquer !
Tabriz sera ma dernière grosse étape en Iran avant de continuer plus à l’ouest vers la Turquie. Et ce qui ne devait être qu’un court passage d’une journée ou deux se transformera en un séjour de 3 jours et 4 nuits, profitant à la fois de la compagnie de Moonzur, avec qui on rigole bien, et à la fois de mes derniers instants en Iran dont je pense déjà avec nostalgie à l’idée de quitter très prochainement…
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- Les boites à donation que l’on trouve à peu près à chaque coin de rue de n’importe quelle ville et village d’Iran. Un « bon musulman iranien » doit donner régulièrement, sinon il est très mal vu de ses confrères… (L’argent est reversé aux plus démunis)
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Moonzur m’embarque dans son périple pour Jolfa, un village situé à la frontière azerbaïdjane environ 150km au nord de Tabriz. Nous devrons d’abord prendre un bus jusqu’à Marand, puis un taxi pour la dernière partie du trajet. Sur une demi-journée nous partons explorer le très ancien monastère arménien de Saint-Stepanos niché au coeur des montagnes. Magnifique.
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- La route de Jolfa serpente à travers les montagnes et notamment le long de la rivière qui fait office de frontière entre l’Iran et l’Azerbadjian.
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Après cette petite expédition dans l’extrême nord de l’Iran nous rentrons à Tabriz pour y passer une dernière journée. Longues balades aux quatre coins de la ville sans but précis puis quelques restos pour se faire plaisir et beaucoup de temps passé sur les marchés afin de dénicher des vêtements chauds !
J’ai bien du mal à m’habituer à ces températures… je crois que mon corps avait “oublié” la sensation de froid depuis quelques années. Il me faudra dans un premier temps acheter un nouveau bonnet d’hiver pour remplacer celui qu’un copain de Sydney, Christopher, m’avait donné il y a 3 ans lorsque je venais tout juste d’arriver en Australie !
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Je quitterai définitivement Tabriz le 3 décembre pour me rendre à Orumiyeh, dernière ville avant la frontière turque. Moonzur reste ici encore quelques jours, et il se peut que je le recroise dans une semaine à Istambul si nos plans coïncident. En tout cas ce fût un plaisir de voyager avec toi en Iran camarade. A la prochaine !
Le voyage en bus vers Orumiyeh m’embarquera -par surprise- pour une traversée en bateau du lac Ourmia. Ce lac salé, l’un des plus grands lacs du Moyen-Orient, est aujourd’hui menacé d’asséchement… Je peux voir que le niveau du lac est en effet très bas par rapport à ses berges. Un vieux projet de pont jamais achevé ne permet pas de traverser par la route alors c’est un bac qui effectue la traversée d’une rive à l’autre avec à son bord les véhicules, voitures, camions, bus et passagers.
Puis c’est vers le milieu de l’après-midi que j’arriverai à Orumiyeh, avec le ferme espoir d’embarquer immédiatement dans le premier bus à destination de la Turquie.
Mais contrairement à ce que je que j’avais prévu je ne dormirai pas en Turquie ce soir…
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4) Orumiyeh – Dernière étape avant la Turquie
J’apprends en arrivant à la gare routière d’Orumiyeh que plus aucun bus ne part vers la Turquie aujourd’hui, il est trop tard ! Comment ça trop tard ? Je n’arrive pas à le croire !
Je fais le tour de tous les bureaux de toutes les compagnies de bus/minibus de la gare, sans succès. Il doit être aux alentours de 15h00 mais à priori la route est encore longue jusqu’à la frontière (à cause des montagnes à traverser) et les postes de douanes ferment vers 16h00 ou 17h00. Impossible donc d’arriver en si peu de temps. Les prochains bus vers la Turquie ne partirons que demain… Argh, une journée de perdue !
Je n’avais absolument pas envisagé de passer une nuit à Orumiyeh mais je dois me rendre à l’évidence, je n’irai pas plus loin aujourd’hui. Il ne me reste plus qu’à trouver un endroit pour dormir (peut-être dans la gare, comme à Yazd ou à Jahrom précédemment) et puis à m’occuper comme je peux jusqu’au soir…
Le hasard ou la providence voudra que je croise le chemin de Monsieur Sajed Mech en errant dans le grand hall de la gare routière. Sajed est la première -et seule- personne réellement anglophone que je vais rencontrer à Orumiyeh, il viendra naturellement me proposer son aide en me voyant déambuler seul dans la gare.
Très peu de voyageurs étrangers passent dans cette région de l’Iran et Sajed ne cache pas sa surprise, ni sa joie, de rencontrer un Européen. Il m’invitera spontanément à venir dormir chez lui.
Je rencontrerai alors sa femme, très gentille, anglophone elle aussi mais un peu plus timide, qui devient alors la première -et unique- femme iranienne que j’aurai eu la chance de voir sans le voile, à visage entièrement découvert, malgré trois semaines passées en Iran et de nombreuses rencontres et invitations à domicile. Sajed et sa femme forment un joli couple fraîchement marié, ils sont ouverts d’esprit, libérés, “rebelles” à leur manière, et à la fois raffinés, éduqués, presque coquets. Une rencontre inoubliable pour ma dernière journée et ma toute dernière nuit en Iran.
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- Sajed et sa femme m’invitent à passer la nuit chez eux en attendant de trouver un bus pour la Turquie.
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5) Vers la Turquie…
Sajed me proposera son aide pour trouver la meilleure route afin de rejoindre la Turquie le lendemain. Et contrairement à ce que j’imaginais, le chemin le plus court (sur la carte) n’est pas forcément le plus rapide, ni le plus pratique, ni le plus emprunté !
En fait, c’est même tout l’inverse : il vaut mieux faire un détour d’une -ou deux- centaines de kilomètres par le nord afin de récupérer un axe plus important (qui reste malgré tout une toute petite route de montagne). Je découvre aussi qu’il n’y a pas de bus, mais seulement des minibus ou des taxis partagés, pour un voyage qui dure tout de même une demi-journée…
Je prendrai donc un minibus, ou plutôt une sorte de longue voiture break/familiale transportant une demi-douzaine de passagers iraniens en route vers la Turquie. Nous ferons d’abord une escale dans la ville de Khoy, au nord d’Orumiyeh, avant de virer à l’ouest pour traverser la chaîne montagneuse qui sépare l’Iran de la Turquie.
C’est sur une route tortueuse, déserte et bordée de massifs enneigés que nous effectuons le voyage jusqu’à la frontière turque. Plus nous avançons vers l’ouest et plus nous grimpons en altitude, ce qui a pour effet immédiat de faire descendre la température et d’augmenter l’épaisseur de la couche neigeuse !
Je réalise alors en observant le manteau blanc de chaque côté de la route, totalement emerveillé, que je n’avais pas vu de neige depuis trois ans déjà ! Pas vu de neige depuis mon passage en Nouvelle-Zélande, c’était en 2011 avec Adrien et David. Toute cette neige, quel spectacle ! Et quelle émotion !
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- Quelque part entre Khoy et la frontière turque… La route est mince mais l’épaisseur de neige est conséquente !
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Nous arrivons en milieu de journée à la frontière turque, soigneusement défendue par des tours de garde et quelques militaires lourdement armés.
Les obligations administratives prendrons un peu plus de temps que prévu, au moins une heure en tout pour notre groupe. En tant que citoyen européen je n’ai pas besoin de visa pour entrer en Turquie, mon passeport suffit. Cependant, jusqu’au dernier moment je n’avais pas la certitude que ce poste frontière était ouvert aux étrangers, c’est donc avec un énorme soulagement que je récupère mon passeport fraîchement tamponné d’un petit logo aux couleurs de la Turquie, daté et signé par l’agent douanier.
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- A la frontière entre Khoy (en Iran) et Van (en Turquie). Plusieurs heures de route nous séparent d’un côté comme de l’autre de la première ville.
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Une fois remontés à bord de notre véhicule et autorisés à passer physiquement “de l’autre côté” de la frontière, c’est dans les rires et les applaudissements que le petit groupe d’Iraniens que j’accompagne exclament leur joie d’être arrivés en Turquie.
“Welcome to Paradise !” (Bienvenue au Paradis) s’écrie le chauffeur en nous lançant un regard chaleureux et complice dans le rétroviseur, le sourire jusqu’aux oreilles. L’ambiance dans le véhicule est euphorique, la jubilation de mes voisins de siège est telle que j’arrive à la ressentir et même à la partager, sans vraiment la comprendre. Mais je sais qu’à leurs yeux, à cet instant, l’Iran est une prison de laquelle ils viennent de s’échapper pour entrer dans un espace de libertés, la Turquie, qu’ils n’hésitent pas à appeler “le Paradis”.
La suite au prochain article… en Turquie !
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