Cedar Bay : Trek, camping, et découverte d’un ancien camp hippie dans la jungle

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Publié par Froggy | Classé dans Article-photos, Océanie | Publié le 02-06-2013

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P1150976Introduction

Cet article nous emmènera de Wallaby Creek (voir l’article précédent) jusqu’à Cedar Bay, via 2 jours de trek à travers la forêt tropicale. Nous sommes au nord-est de l’Australie, dans l’état du Queensland, sur la côte Est de la péninsule du Cap York.

D’abord, situons le contexte : Cedar Bay, c’est le nom d’une baie mais c’est aussi le nom du parc national dans lequel se trouve la baie, c’est à dire à 50 km au sud de Cooktown. Cedar Bay, c’est aussi un ancien repère hippie des années 1970. En effet, les plages de Cedar Bay sont situées dans un endroit reculé qui n’est accessible par aucune route ni aucune piste. Il faut marcher à travers la forêt sur un tout petit sentier pas toujours balisé, pendant plusieurs heures, pour rejoindre cet endroit paradisiaque.

Il y a 2 chemins pour y accéder, le premier, que nous emprunterons à l’aller, part de Wallaby Creek (près de Rossville) et nécessite une bonne journée de marche pour arriver au bout. Le second chemin est plus court, plus rapide, mais aussi beaucoup plus difficile, voire complétement impraticable en saison des pluies, nous l’emprunterons au retour.

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Un ancien camp hippie, ca veux dire quoi ?

L’Australie, comme beaucoup d’autres pays, a connu un mouvement hippie important dans les années 70. Tous les endroits agréables à vivre (climat, végétation, paysage, etc.) et un tant soit peu reculés du monde civilisé étaient les lieux de vie privilégiés des jeunes baba-cool de cette époque. Cedar Bay était l’un de ces lieux. Autrefois, des dizaines de personnes y vivaient en semi-autonomie. Aujourd’hui, encore quelques personnes y vivent à plus ou moins long terme (de quelques jours à plusieurs mois), ainsi que quelques randonneurs qui y passent de temps en temps. Mais l’endroit n’est ni touristique, ni même populaire, certainement à cause de la difficulté d’accès. En plus d’être situé loin des routes, il est situé géographiquement dans une région reculée de l’Australie. C’est pour ces raisons que l’endroit est si protégé, peu connu, et qu’il est resté authentique.

Aujourd’hui, il reste encore quelques vestiges de ces anciens campements hippies, comme des tippis, des tentes et des hamacs abandonnés, des petites constructions en bois ultra-basiques comme des tables et des étagères de cuisine, et des bâches en plastiques en guise de toiture par exemple. Tous ces accessoires ont été laissés là par d’anciens hippies ou randonneurs, mais il ne sont pas à proprement parlé « abandonnés ». Ils sont devenus des sortes de refuges qu’utilisent toujours aujourd’hui les marcheurs de passage à Cedar Bay.

Nous avons par exemple profité de la petite cuisine pour nous faire à manger, utilisant les casseroles, couverts et autres ustensiles de cuisines, mais aussi les herbes et les épices, ainsi que quelques aliments stockés ici comme du riz, du sel et du thé. En échange, avant de quitter les lieux nous laisserons à notre tour notre trop plein de nourriture.
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Une journée et demi de marche pour rejoindre Cedar Bay

C’est donc sacs au dos, avec mon amie Nina, que nous prenons le chemin de Cedar Bay. Nous avons quelques provisions de nourriture, un peu de riz, des nouilles, quelques biscuits et un reste de pain et de confiture, de quoi tenir quelques jours. Nous savons de source sure, grâce aux gens rencontrés sur le festival, que, une fois arrivé à Cedar Bay nous pourrons manger des noix de coco à volonté. Nous ne mourrons pas de faim !

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P1150964Le trajet peut être fait dans la journée, mais en partant assez tard et en prenant notre temps pour marcher, nous n’arriverons que le lendemain après-midi.

Nous ne sommes pas pressés, et puis la forêt est magnifique : végétation luxuriante, arbres exotiques tous plus beaux les uns que les autres, énormes racines et innombrables lianes tombant des arbres, rivières et chutes d’eau dans lesquelles nous pouvons boire et nous baigner… Mais aussi les immanquables moustiques et les nombreuses sangsues qui se collent à nos jambes pour nous pomper le sang… Là, nous sommes bien dans la jungle !

Nous passerons donc une nuit dans la tente au milieu de cette forêt tropicale, à mi-chemin de Cedar Bay. Camping et feu de bois, repas chaud bien mérité, la nuit sera calme et pleine de repos.

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En arrivant à Cedar Bay, nous sommes accueillis par un couple ayant aménagé ici quelques jours avant nous. Jonnas et Jessica nous présentent leur tipi et quelques uns des campements éparpillés dans la forêt. Ils sont les seuls à vivre ici en ce moment, nous pouvons donc choisir n’importe lequel des petits campement pour nous installer. Près de la rivière, ou alors plus proche de la plage, ou à mi-chemin entre les 2, c’est à nous de décider.
Nous opterons pour le campement principal qui se trouve à 50 mètres de la plage, et nous y installerons notre propre tente.

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Cedar Bay !

L’endroit est magnifique, c’est encore plus grandiose que tout ce nous avions espéré. La plage est infiniement longue et infiniment belle, elle est bordée de cocotiers qui forment comme un rideau, la séparant du reste de la forêt. Elle est absolument déserte, jonchées de noix de coco, d’algues, de coquillages, et parfois de restes d’animaux comme cette carapace de tortue marine d’un mètre de large. Plusieurs heures de marche dans une direction ou dans l’autre ne suffisent pas à faire le tour de cette plage.

L’impression d’être sur une ile déserte au milieu d’un océan, au bout du monde, loin des villes et loin des routes, loin des hommes.

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Les estuaires des rivières que nous croisons le long de la plage nous offrent à chaque fois des points de vue paradisiaques, formant des petits lagons entourés de cocotiers et d’arbres tropicaux, bordés de sable blanc donnant directement sur la plage et sur la mer. La tranquillité de ces lieux est absolue, parfaite, mais elle peut aussi cacher un danger mortel : les crocodiles. C’est pourquoi nous ne nous baignerons pas dans ces petits lagons paradisiaques, ce sont les lieux de prédilections des crocodiles. D’ailleurs, il n’est pas toujours facile de distinguer la forme sombre d’un objet reposant au fond de l’un de ces lagon… Est-ce simplement un arbre mort, un amas de branches, un rocher ? Ou ce pourrait-il que ce soit un crocodile attendant patiemment sa proie dans les profondeurs du lagon ? Ces petits coins de paradis se transforment vite en des lieux terrifiants quand vous imaginez qu’il y a peut-être un crocodile caché au fond de l’eau…

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L’intérieur de la foret est encore plus calme que la plage elle-même, pas un souffle de vent, seul le gazouillement de quelques oiseaux dérange ce silence méditatif. Il y fait aussi très sombre le matin et en fin de journée, à cause de l’épaisseur de la forêt.

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Nous avions prévu d’y passer quelques jours, nous resterons finalement une semaine complète à Cedar Bay. Difficile de quitter un endroit pareil !

Mais si nous voulons survivre pendant une semaine, il nous faudra rationner notre nourriture, et nous taperons un peu aussi dans les réserves de riz du campement. Mais nous vivrons surtout de noix de coco, d’algues et de fruits de mer pendant une semaine.

P1150992En effet, plus de 50% de notre nourriture provient de ce que nous ramassons sur la plage : noix de coco fraiches, angel fruits (noix de coco germées, contenant un fruit blanc, spongieux, gras et très nourrissant), coquillages, et algues fraiches ramassées dans l’eau que nous faisons cuire pour accompagner des nouilles ou du riz. Nous tenterons aussi de pêcher plusieurs fois dans la rivière proche du campement, mais sans succès.

En étant un mieux préparé, avec plus d’équipement il serait tout à fait possible de pêcher et d’obtenir du poisson frais tous les jours. Il est aussi possible de chasser les cochons sauvages si vous tombez par hasard sur l’un d’entre eux. J’imagine qu’il est possible aussi de manger du crocodile si vous avez la « chance » d’en trouver un et le courage de le tuer, mais là c’est une autre histoire ! Moi, je préfère ne pas croiser leur chemin…

La rivière qui passe à quelques centaines de mètres du campement nous apporte de l’eau à boire, parfaitement pure, fraiche, délicieuse, bien meilleure que l’eau du robinet des villes australiennes pleine de fluor, au gout de produit chimique. La rivière est belle, son eau est pure, nous la buvons en amont, nous y faisons notre toilette en aval, et nous y péchons dans son estuaire. Il y a même une très longue corde accrochée en haut d’un arbre, suspendue au dessus d’un profond bassin dans l’un des méandres, sur laquelle on peut jouer à Tarzan en se jetant tout nu dans la rivière au milieu de cette verte forêt tropicale. L’endroit est vraiment magique, difficile de mettre des mots sur un endroit aussi parfait.

En passant une semaine au campement nous ferons la connaissance d’autres randonneurs et hippies qui arrivent du festival et viennent passer quelques temps à Cedar Bay. Certains ont même prévu d’y passer plusieurs mois, apportant avec eux quelques kilos de riz et du matériel de pêche. L’un d’entre eux, Oli, un Anglais vivant illégalement en Australie depuis 2 ans, est un personnage très intéressant. C’est l’une des premières personnes que je rencontre qui arrive à vivre complétement en dehors de la société, ou disons à 95% coupé du système. Barbe et cheveux longs, sales et en pétard, marchant toujours pieds nus en portant sa machette le long de son short en haillon, il ressemble à un Robinson Crusoé ayant vécu dans la forêt depuis des années. Et pour cause, il vit dans la forêt depuis 2 ans ! Connaisseurs des plantes et des fruits de la forêt, il sait ce qu’il peut ramasser et manger pour survivre. Végétalien, il ne pêche ni ne chasse jamais, sa nourriture est constituée de plantes uniquement. Grimper un cocotier ne lui fait pas peur, c’est du quotidien. Malgré son look un peu ’sale’ et son mode de vie marginal, il est en pleine forme et tout à fait social. Il se déplace en stop en Australie quand il a besoin de bouger, et n’a travaillé que quelques semaines en 2 ans en Australie. Il vit presque sans argent, quasiment toujours dans la nature, les villes ne sont pas faites pour lui. Et même s’il se débrouille très bien pour construire des tipis et des cabanes en bois, il vit dans un simple hamac minimaliste tiré entre 2 arbres et recouvert d’une légère toile. Oli, un personnage à part.

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Voici un aperçu de notre campement, ici la « cuisine » : quelques planches de bois recouvertes d’une bâche. Notre tente est posée un peu plus loin sur la gauche. Et derrière, à 50 mètres, se trouve la plage.

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Je m’entraine à grimper aux cocotiers sur la plage, mais pour y aller tranquillement je commence par ceux qui sont à l’horizontal !

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Qu’est ce qu’on est bien, là, à ramasser des noix le coco pour le petit déjeuner !

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Le chemin du retour

Une semaine est passée depuis que nous sommes arrivé à Cedar Bay. Nous serions bien resté plus longtemps mais nous n’avons plus de nourriture et puis nous avons aussi prévu de visiter d’autres coins de la péninsule du Cap York. Nous remballons nos affaires et disons au revoir à ce lieu de tout beauté, beauté visuelle autant que spirituelle. En espérant très fort que cet « au revoir » ne soit pas un adieu… en effet il me tarde déjà d’y revenir un jour.

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Pour partir nous empruntons au autre chemin, qui longe la plage sur plusieurs kilomètres avant de nous faire crapahuter sur les rochers pendant une petite heure, quand la marée est suffisamment basse pour nous ouvrir la voie. Avant de quitter la plage définitivement nous prenons un dernier bain dans l’océan, gardant un œil aiguisé sur la surface de l’eau pour éviter de rencontrer de sales bestioles comme ces « salt water crocodiles » qui peuplent toute la péninsule du Cap York. Rafraichis, nettoyés de notre sueur, nous quittons la côte pour suivre la piste qui s’enfonce dans la forêt, dense, pentue, rocailleuse. Ca monte sec, la randonnée se transforme parfois en escalade, d’ailleurs il y a par endroits de grosses cordes accrochés aux arbres qui sont indispensables pour avancer, grimper, s’extirper de ce sentier abrupte et glissant. Si nous étions en saison des pluies, la piste serait absolument impraticable, mais en ce moment c’est la saison sèche, nous avançons lentement mais surement !

Après 6 heures de trek difficile sous cette chaleur tropicale, nous sortons enfin de la forêt pour tomber sur une toute petite route de campagne même pas goudronnée. Nous marchons encore une heure sur cette piste en espérant rejoindre un village et en tentant d’arrêter les quelques voitures qui se comptent sur les doigts d’une main. Pas de village à l’horizon, rien, nous nous résilions à nous poser dans un coin d’ombre et à nous concentrer sur l’autostop, malgré l’absence quasi totale de circulation. Enfin, après encore une heure d’attente, un 4×4 s’arrête et nous propose son aide pour aller vers Cooktown. Nous voilà tirés d’affaire, après avoir rejoint la route principale nous trouverons un autre conducteur sympathique qui nous déposera à Cooktown en début de soirée. Retour à la civilisation !

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Commentaire(s) (7)

Comme toujours, on se projette soit même, lors de vos récits, dans votre aventure en se demandant pourquoi, nous, nous n’avons pas fait de même. C’est tellement vivant et passionnant que l’on a vraiment envie de partir pour vous rejoindre et se nourrir de noix de coco, de poissons, fruits et plantes… Bref le rêve, quoi ! bien que ces crocodiles, ces chenilles (surement urticantes) pourraient porter à réflexion.
Il me semble aussi que, même si la muraille de Chine, avec votre belle épopée, a été formidable, et bien ce que tu racontes là, Julien, a dû te laisser de très bons souvenirs.
C’est un peu, comme tu le dis, la vie de Robinson C.
échoués (vous êtes deux) sur une fausse ile « déserte ».
On a donc encore été scotchés à la lecture de cette nouvelle page.
Les photos sont vraiment belles et semblent être d’un autre monde.
Très bonne continuation et prends garde à tous les crocodiles que tu rencontreras.

uh! quels souvenirs! comme cette vie ma manque! peut-etre nous retournons-la un jour ….

merci paur la narration, j’ai la savouré (plus, j’ai compris presque tout sans le compulser!)

juste envie d’y passer rien qu’en te lisant!
merci pour le témoignage.
une chose de plus sur la To Do List!

Alors là, c’est le rêve ! Quelle ambiance !!! Bien que ta narration n’y soit pas pour rien, toujours aussi talentueux à ce sujet ;-) Je vais vraiment finir par insister pour que tu écrives un bouquin si tu continues de nous pondre des articles comme celui-ci !

En tout cas, c’est clair que ça donne envie d’y aller. Qu’y n’a jamais rêver d’âtre sur une plage de bout du monde comme celle-ci ? Non pas pour la solitude, mais pour se confronter à cette nature magnifique ou pour échapper aux obligations du quotidien. Enfin, quelle que soit la raison, même par pur plaisir, ce petit coin de paradis a sacrément l’air de valoir le coup d’œil.

Seul, cela doit être magique, mais à deux, pour partager des moments probablement inoubliables comme tu as du le faire, cela restera je pense l’un de tes meilleurs souvenirs :-) (et je l’espère de tout cœur !)

En tout cas, ton article m’a donné la patate !!
Bonne continuation Julien, continue de nous faire rêver ;-)

Tchoo !

Encore merci pour pour nous faire partager vos aventures. Ce blog est un fantastique roman de voyage et d’aventure. Chaque nouvel article est un plaisir de lecture.

Sympa le décor, c’est vraiment magnifique !! ça me donne plein d’idées pour partir tout ça !

En tous cas votre article m’a bien fait réver donc MERCI ;)

Ca donne envie d’y aller.
L’isolement, pendant quelques temps, c’est chouette, surtout dans un paradis :-)

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